Découvrir le Vexin, c’est bien sûr s’intéresser à son passé.
Evènement méconnu de la plupart, et pourtant non des moindres, oublié des livres d’Histoire, la Bataille du Vexin a pourtant la particularité d’avoir été la seule en Ile-de-France à voir s’affronter des blindés lors de la Libération (chars Tigres réputés invincibles côté allemand versus Sherman et Tank Destroyers côté américain). Elle aura par ailleurs joué un rôle non négligeable dans la victoire face à l’ennemi.
Ces 10 et 11 Septembre 2022, des passionnés d’histoire et de la Seconde Guerre Mondiale se sont rassemblés pour la troisième fois à Fontenay-Saint-Père, à l’initiative de l’association Vexin Histoire Vivante, pour commémorer cet épisode tragique.
Les membres des associations UNIVEM, R.S.H 1944 et 79th Memory Group ont ainsi dressé leurs campements et revêtus leurs uniformes de soldats américains, allemands, de combattants de la Résistance ou d’infirmières du front pour perpétuer le souvenir de ces terribles combats et sensibiliser le public.
Au programme de ces deux jours de mémoire, outre l’ouverture des campements et espaces d’exposition aux visiteurs, se sont déroulés une cérémonie au mémorial situé à la sortie du village, l’inauguration d’un deuxième tronçon de l’itinéraire Vexin 1944, une conférence posant la question de la transmission de la guerre en tant que patrimoine culturel, une opération commando réservée aux intervenants, ou encore un bal en tenue rétro sur le village de Brueil-en-Vexin.
J’ai pour ma part pu me joindre, à un convoi d’une quinzaine de véhicules militaires qui a pris la route vers Sailly situé à quelques kilomètres de là et remercie les personnes rencontrées et qui ont bien voulu se faire prendre en photo pour illustrer cet article.
La bataille du Vexin (19 – 31/08/1944)
Le 19 août 1944, soit un peu plus de deux mois après le débarquement des alliés et des 177 soldats français du commando Kieffer sur les plages de Normandie, les troupes du Général Patton atteignent Mantes ; Mantes dont le pont, ainsi que celui de la Roche-Guyon ont été détruits à l’explosif par le Génie français en 1940, pour empêcher la progression des troupes allemandes au sud de la Seine. Le lendemain, 20 août 1944, elles lancent une tête de pont et franchissent le fleuve en divers points à bord d’embarcations et grâce à un pont flottant. Une fois gagnée la rive droite, elles lancent l’offensive à coups de canon. Face aux ripostes allemandes, les troupes américaines se retrouvent dans un premier temps acculées sur une ligne Vétheuil / Porcheville, constellée de barbelés et de mines, avant de progresser peu à peu vers les forêts et les villages du sud du Vexin. Egalement bombardées, Fontenay-Saint-Père, comme ses voisines Sailly, Drocourt et Brueil-en-Vexin, seront le théâtre de violents affrontements de chars d’artillerie. Dans la seule nuit du 24 au 25 août, ce sont plus de 5600 tirs d’obus qui seront effectués. Ces combats acharnés se solderont par le repli de l’armée allemande, décimée, qui cessera progressivement toute résistance. Fontenay sera libérée le 28 août, suivie par toutes les autres communes du Vexin d’ici au 31. La bataille aura par-delà contribué à la libération du nord de la France, de la Belgique et des Pays-Bas dans les jours qui suivirent.
Pendant 10 jours, ce sont au total 30 000 soldats des 79th, 314th et 30th Infantry Divisions américaines et de la 18. Luftwaffen-Feld-Division allemande qui auront combattu sur ce champ de bataille. En résulteront de terribles pertes humaines : 300 morts dans le camp des GI, 2000 côté allemand, mais aussi une centaine de victimes parmi les civils et des milliers de blessés.
N’oublions pas les fusillés de Charmont, ultimes victimes de la Libération. Le 21 août, à Arthies, une poignée de résistants de la FFI s’attaquent à un camion ennemi qu’ils croient en déroute. Ils font quelques prisonniers et tuent un officier allemand. Le lendemain, en représailles, un groupe de nazis rafle vingt-cinq personnes sur les communes d’Arthies et d’Aincourt avant de les acheminer jusqu’à Charmont près de Magny-en-Vexin. Quelques-unes seront libérées, certaines parviendront à s’enfuir, les autres seront fusillées au lieu-dit « la Fosse Rouge », ainsi que quelques habitants de Charmont abattus au hasard. Au total, ce seront 15 personnes qui trouveront la mort ce 22 août 1944, aux portes de la Libération.
Le monument commémoratif de Fontenay-Saint-Père et l’itinéraire Vexin 1944
Un monument en mémoire des victimes civiles et militaires a été inauguré l’an passé à la sortie du village.
L’itinéraire pédestre « Vexin 1944 » développé par « Vexin Histoire Vivante » en partenariat avec le PNR du Vexin et les communes concernées, retrace quant à lui au travers de panneaux explicatifs les évènements de la Bataille du Vexin au fil de la progression des troupes alliées. Le premier tronçon, reliant Fontenay-Saint-Père à Sailly est d’ores et déjà accessible. Il passe notamment par l’emplacement où ont été découverts par hasard, lors de fouilles archéologiques, les restes d’un char tigre allemand, en bordure de la D913.
Pour en savoir plus sur la bataille du Vexin
J’ai pu recenser quelques livres traitant de ce lourd sujet. Ces ouvrages semblent néanmoins difficiles à se procurer…
- « La tête de pont de Mantes, la bataille du Vexin. Mémorial des Combats de la Libération Aout 1944 – Mantois – Val de Seine – Vexin » par Bruno RENOULT et Geneviève HAVELANGE (ouvrage de 350 pages illustré de 700 photos)
- Des mêmes auteurs, « La bataille du Vexin » (ouvrage de 336 pages et de 1000 photos retraçant heure par heure, village par village, le déroulé des combats issus du recueil de témoignages d’habitants et et vétérans des deux camps).
- « Le combat du 21 août 1944 à Arthies et les violentes représailles du 22 août 1944 » par Jacques MICHEL, habitant du Vexin (livre de 120 pages édité par Val d’Oise Editions, également disponible à sa sortie en 2012 dans les mairies du canton de Magny en Vexin, certaines en ont peut être encore un exemplaire)
